Comment devenir producteur de lait?

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Comment ça s’apprend, être producteur de lait?

Si bien des choses peuvent s’apprendre à l’étable – comme traire une vache ou encore nourrir les animaux – d’autres, dont certaines normes de santé et sécurité, nécessitent une formation en bonne et due forme. On en discute avec Benoit Daviau, professeur à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec (ITAQ) depuis 1999, et Sylviane Beaudry, une productrice laitière au parcours atypique.

Presque tous les producteurs et productrices de lait iront, un jour ou l’autre, sur les bancs d’école pour apprendre ou parfaire leur métier. Reprise de la ferme familiale, perfection de leur formation terrain acquise au fil des années ou encore démarrage de leur propre ferme : c’est la plupart du temps en classe que tout ce beau monde définit la façon dont il veut pratiquer son métier.

Plus d'un chemin mène à la table

Benoit Daviau a formé plusieurs aspirants agriculteurs et agricultrices au cours de sa longue carrière d’enseignant. Un constat qu’il fait d’emblée est que chaque producteur et chaque productrice de lait est unique. Et si personne n’arrive à l’étable de la même façon, tout le monde finit par trouver son chemin.

« La majorité des élèves reprennent une ferme (familiale ou non apparentée). C’est le chemin scolaire classique : on va apprendre le métier en classe pour ensuite opérer la ferme », explique-t-il.

Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. « Par exemple, on va avoir des gens qui ont étudié ou travaillé dans d’autres domaines (ingénierie, vétérinaire, agronomie). C’est leur passion pour le bien-être animal, les végétaux ou le mode de vie d’agriculteur qui les ramène en classe », ajoute le professeur.

Tous les parcours ont une valeur. » – Benoit Daviau

Quand l’herbe est plus verte à la ferme

C’était en 2005. Sylviane Beaudry apprend de ses parents que son plus jeune frère a finalement décidé de ne pas reprendre la ferme familiale de Saint-Marc-sur-Richelieu. L’orthopédagogue, qui enseigne alors en Alberta et qui doutait de son envie de faire ça toute sa vie, décide d’effectuer un changement de carrière inattendu.

À 35 ans, elle quitte sa province d’adoption, bébé dans le bedon, et revient au Québec opérer la ferme familiale. Si cet endroit avait été pour elle « un grand terrain de jeu » lorsqu’elle était jeune, il lui fallait maintenant en apprendre les rouages parce qu’il était maintenant son lieu de travail

Producteur de lait, un métier en constante évolution

Par chance, être productrice laitière, ça s’apprend. Sylviane Beaudry peut en témoigner : « Quand j’ai commencé, j’ai fait beaucoup de lectures, j’ai assisté à des conférences et j’ai posé énormément de questions. J’ai fait deux cours en ligne à l’Université Laval et des cours de formation continue à l’ITAQ ». Pour cette académique qui a toujours adoré fréquenter les bancs d’école, aller chercher une formation de base en production laitière pour renforcer ce qu’elle avait déjà appris lors de ses études collégiales en sciences pures et santé allait de soi.

Bien qu’avoir un diplôme n’est pas « obligatoire » pour opérer une ferme, l’enseignant Benoit Daviau estime que la formation – collégiale, universitaire, professionnelle ou continue – permet aux agriculteurs et agricultrices d’en apprendre davantage sur leur industrie qui ne cesse d’évoluer.

« Le secteur laitier est très technique, admet-il. C’est un domaine où il y a beaucoup de recherche et développement, que ce soit dans le domaine de l’alimentation, de la génétique, du bien-être animal. » Il ajoute que l’intelligence artificielle, les algorithmes et les nouvelles technologies en robotisation et en automatisation sont également des enjeux stratégiques pour toute entreprise laitière et pour lesquels il existe de la formation.

Étudier, c’est s’outiller pour faire face aux défis de l’industrie. » – Benoit Daviau

Les Producteurs de lait du Québec (nous!) soutiennent de leur côté le développement de compétences et le partage de connaissances de plusieurs façons : en offrant des bourses aux étudiants et étudiantes de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal et de la Faculté des sciences de l’agriculture de l’alimentation de l’Université Laval, en commanditant des événements de transfert de connaissances et même en partageant une foule d'informations sous différentes formes aux producteurs et productrices de lait.

Un métier à échelle humaine

L’un des plus grands défis qu’a dû surmonter le secteur laitier dans les dernières décennies n’a rien à voir avec les technologies. Il s’agit plutôt de la gestion de ses ressources humaines.

« Passer d’un modèle de gestion familiale à deux personnes (comme un couple!) à un modèle de gestion à plusieurs personnes (par les frères et sœurs, leurs enfants, les cousins, les cousines, les neveux, les nièces…) a nécessité beaucoup d’éducation en ressources humaines et en communication », révèle le professeur.

C’est aussi à l’école qu’on apprend aux producteurs et productrices comment planifier l’avenir de leur ferme laitière. « On insiste beaucoup sur l’importance d’avoir un plan stratégique. De savoir où on s’en va, d’anticiper le futur », confirme Benoit Daviau.

Quelques exemples de formations reconnues et offertes au Québec

L’attestation d’études collégiales (AEC) en techniques de transformation du lait en produits laitiers de l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec

On y apprend quoi? Comment transformer différents produits laitiers, les règles de santé, de sécurité et environnementales associées à la transformation.

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Le diplôme d’études collégiales (DEC) en gestion et technologies d’entreprise agricole (GTEA) de l’Institution de technologie agroalimentaire du Québec

On y apprend quoi? Comment gérer une ferme ou une entreprise agricole, approfondir ses connaissances dans une production de son choix (comme la production laitière!), en développement durable, en innovations technologiques et en machinerie.

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Cette formation est également offerte dans de nombreux cégeps. Certains établissements offrent même une spécialisation en production animale, comme la production laitière.

Le diplôme d’études professionnelles (DEP) en production animale avec spécialité en production laitière du Centre de formation agricole Saint-Anselme

On y apprend quoi? Comment s’occuper des animaux d’élevage, de l’entretien des bâtiments, de la machinerie, de l’équipement et de l’outillage.

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Le baccalauréat en agronomie de l’Université Laval

On y apprend quoi? Comment développer une vision globale des systèmes de production agricole pour pouvoir conseiller, gérer et même se spécialiser en recherche et développement dans le milieu agricole.

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La formation continue sur la manipulation de bovins offerte par l’Union des producteurs agricoles

On y apprend quoi? Les caractéristiques des perceptions sensorielles du bétail et les interactions sociales normales du bétail.

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Parce qu’on n’a jamais fini d’apprendre

Ce n’est pas parce qu’on tient son diplôme entre ses mains qu’on a fait le tour de ce qu’il y a à savoir sur le secteur laitier. Et c’est pour ça qu’existe la formation continue. C’est quoi la formation continue, au juste? Selon l’Office québécois de la langue française, la formation continue s’inscrit « dans la suite d’une formation initiale et visant à mettre à jour ou à élargir, par les voies éducatives appropriées, des connaissances théoriques et pratiques, à développer la culture, les capacités personnelles ou les compétences professionnelles ». Autrement dit : elle nous permet de continuer d’apprendre.

Benoit Daviau voit de nombreux avantages à suivre de petits cours ou de courtes formations ici et là : « ça permet d’être au fait des nouvelles exigences, des attentes sociétales, des pratiques environnementales, des technologies à venir, de la modernisation des infrastructures ».

Les productrices et producteurs de lait sont aussi conscients des avantages, c’est pourquoi, malgré un emploi du temps plus que chargé, ils se gardent du temps chaque année pour se perfectionner. Il faut aussi dire que ces formations sont souvent pensées pour les accommoder : elles peuvent durer de quelques heures à quelques jours, elles sont souvent offertes à la carte et elles peuvent parfois même être suivies à distance.

Sylviane Beaudry a d’ailleurs eu recours à la formation continue pour se tenir au courant des sujets chauds de l’industrie : « comment faire son bilan carbone, apprendre la comptabilité verte, gérer nos relations avec les consommateurs, rendre son étable la plus efficace possible… »

Qui plus est, la productrice laitière aime aussi en faire profiter son équipe. Elle revient justement d’un colloque sur la santé des troupeaux laitiers.

Ça ne se peut pas tout savoir, on a toujours à apprendre, il faut toujours se mettre à jour. C’est une question de survie pour l’entreprise. » – Sylviane Beaudry

Le métier de producteur et productrice de lait est voué à évoluer perpétuellement au gré des besoins de la société. Et s’il existe plusieurs façons de l’apprendre, la formation continue est une excellente façon de se maintenir à flot dans cette industrie constamment en mouvement et d’innover.

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